Lors de la restauration de la chapelle des Pénitents, en 1987, furent trouvées, négligemment entassées dans quelques casiers qui conservaient les effets des confrères – des livres d’heures et des « bourras » –, des centaines de coquilles d’escargots vides.
Relief de defructus, le repas annuel et convivial des confrères ? Mais pourquoi conserver des coquilles vides de petits gris ? Le mystère était entier.
L’explication me fut donnée par la lecture d’un document conservé dans le fonds paroissial, rédigé par Victor Eynard, curé de Mollans en 1849 : « Le Jeudi-Saint, dans l’après-midi, les habitants de Mollans se préparent à l’illumination qu’ils font ordinairement le soir à la nuit tombante de ce jour, lorsque le temps est calme et beau pour faire la procession. La confrérie des Pénitents se distingue par son empressement et son exactitude à assister à cette procession. C’est sans contre dit la circonstance de l’année où les habitants de Mollans sont réunis en plus grand nombre dans l’église et en procession (…). Les rues par où passe la procession sont éclairées comme si on était en plein jour ; chacun rivalise de zèle et s’applique à mieux illuminer que son voisin. Il est des maisons qui font brûler jusqu’à quatre cents lampions ou flambeaux que l’on multiplie facilement au moyen de coquillages appliqués aux murs et aux fenêtres avec la terre glaise, disposés en figures telles que croix, ostensoirs, reliquaires. Cette procession, après 1830, avait été suspendue par M. Goudard mon prédécesseur à cause du peu de recueillement qu’on y observait, ou plutôt des désordres qu’elle occasionnait. En 1849, année de mon arrivée à Mollans, un grand nombre de personnes, constituées en dignité, les autorités en tête, vinrent me prier de rétablir cette procession fondée sans doute primitivement pour rendre au Sacrement Auguste de l’Eucharistie les hommages et la reconnaissance qui sont dus à N.S.J.C. dans ce sacrement… Et je consentis à ce que cette procession se fît. »
Tout s’illuminait ! Les traces claires d’argile disposées à intervalles réguliers au-dessus du linteau de la porte de la chapelle et surmontées d’une traînée de noir de fumée étaient les derniers témoins de cette illumination, car ils avaient été protégés par le soustet qui porte la tribune.
Cette ancienne tradition restaurée n’a pas survécu au XIXe siècle et elle s’éteignit certainement avec les derniers confrères en 1874. Pourtant, en d’autres lieux, à Gorbio par exemple, dans le comté de Nice, subsistent des « processions aux limaces » ainsi que les illuminations correspondantes : le folklore a remplacé la dévotion.