E comme Électricité

LES PLUS ANCIENNES CARTES POSTALES de Mollans ont ceci de commun qu’on y remarque de massives potences métalliques et des poteaux de bois soutenant maladroitement une multitude de fils électriques malingres : l’électricité est en effet arrivée à Mollans avec le XXe siècle.

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À la suite du Buis qui avait confié en 1889 son alimentation électrique à Pierre Antoine Rivoire, de Vinay en Isère, à partir de l’usine d’Ubrieux, Mollans et ses édiles lui attribuent la concession de l’éclairage du village pendant 40 ans dans un contrat du 21 décembre 1900, approuvé par le préfet le 11 mai 1901. La concession prévoyait exclusivement l’éclairage public qui utilisait alors des lampes Édison à incandescence. Il devait être assuré en toutes saisons du coucher du soleil à minuit, puis de 4 h 30 au lever du soleil. Il est vrai qu’en ce temps là on se levait tôt, souvent avec le soleil. Les technocrates n’avaient pas encore inventé les heures d’été ou d’hiver ! Une fête fut organisée par la municipalité le 22 septembre 1901 et, pour l’occasion, le conseil municipal et son maire Henri Richard votèrent 100 francs. Dès 1901 on relève dans le budget communal une dépense de 675 francs pour l’achat de lampes électriques ! Une charge supplémentaire,
mais ô combien utile !
Les abonnés pouvaient se raccorder moyennant 20 francs par lampe, aux conditions de l’éclairage public et la consommation forfaitaire s’élevait à 32 francs pour une lampe de 16 bougies. Gageons qu’il ne devait pas y avoir illumination dans toutes les chaumières.
La concession fut reprise ensuite par Charles Blauvac, industriel de Carpentras. Une ligne haute tension fut construite en 1924 à partir de l’usine hydroélectrique d’Eygaliers qui assurait alors la production.

Éclairer les écarts
Malheureusement seul le village pouvait bénéficier du flux d’électrons, et il est facile d’imaginer que les habitants des fermes isolées devaient en ressentir une certaine frustration. Las ! Le 2 octobre 1924 une demande d’E. Rossignol auquel s’étaient associés quelques propriétaires du quartier Saint-Pierre (M. Gambus, J. Bonnet, Pierre Chambon, Louis Brue, Rosine Reynier, Klebert Mouret, Brun, Monnier R. Michel, Léon Ganbus) faisait valoir qu’à eux seuls ils exploitaient 30 ha et ils sollicitaient le concours technique et bien sûr financier du Génie rural pour étudier l’implantation d’une « usine » à la chute du canal agricole de la Jonche. Cette industrie devait alimenter 40 lampes et un moteur agricole. Un avis favorable fut formulé, mais j’ignore s’il fut suivi d’effet.

Transformateur électrique au bout de la rue des aires
Le transformateur au bout de la rue des Aires

L’usine d’Eygaliers par ailleurs s’avéra rapidement insuffisante : le mince filet d’eau du Derboux était trop faible. M. Blauvac recherchait du courant à acheter (ce n’était pas encore le temps des monopoles…) et il réalisa en 1930 un accord de fourniture avec la société Sud-Électrique. En 1927 le conseil municipal avait lancé le projet d’électrification des écarts. L’affaire était ardue car M. Blauvac hésitait à investir dans le raccordement de son réseau à celui de Sud-Électrique.
Finalement Sud-Électrique racheta en 1932 la concession Blauvac et relia le réseau électrique mollanais à celui de Beaumont d’Orange en Comtat Venaissin.
Une concession quarantenaire commençait. Le projet d’électrification des campagnes remis à l’ordre du jour fut adopté en septembre 1935. L’affaire fut conclue le 22 octobre 1937 pour une dépense prévue de 831.117 francs entre le maire de Mollans et Sud-Électrique. En fait la dépense fut plus modeste : quelques 630.000 francs, qui se traduisit toutefois par quelques 692 centimes additionnels !
L’alimentation se faisait par une ligne haute tension de 13500 volts relayée par quatre transformateurs répartis sur le territoire de la commune. Le premier était placé sur la route de Malaucène, à côté de la maison Reynier. C’est lui qui recevait l’alimentation depuis Malaucène qui passait près de l’ancienne ferme Mouret. Un autre était construit après Julian, un autre vers Mérindol à la ferme Julian. Un dernier enfin, aux Richard achevait de quadriller le territoire. En
tout 50 KVA, ce qui est ridicule vu nos consommations actuelles. ❧

Article publié dans le n° 1 de Mémoire d’Ouvèze en 2004.

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